La start-up française EverEver veut commercialiser son lave-vaisselle made in France

On se demande si l’auteur de cet article de BFM RMC comprend l’absurdité et l’ironie de ce qu’elle a écrit : pourquoi faudrait-il utiliser de l’anglais pour mettre en valeur l’industrie française, avec « startup » et « made in France » ?

Rêvons d’une France qui a retrouvé sa langue : L’entreprise française (avec un nom français au lieu d’EverEver) veut commercialiser son lave-vaisselle fabriqué en France. Ce titre paraît-il moins intéressant, moins compréhensible ?

Ou alors, pour aller au comble de l’absurde : La start-up French EverEVer veut marketer son dishwasher made in France ? Au point où on en est…

On ne peut que louer cette décision de redorer le fleuron de l’industrie française

On le sait, face à la concurrence mondiale, notamment chinoise, nos usines ferment les unes après les autres. Donc, comment ne pas se féliciter de cette volonté de fabriquer en France ?

Comme le rappelle la journaliste de BFM RMC : « Une prouesse parce que la plupart des usines historiques d’électroménager françaises ont fermé au cours des 20 dernières années: Electrolux, dans les Ardennes, en 2012, Brandt, à La Roche-Sur-Yon, en Vendée, en 2016, Whirlpool à Amiens, dans la Somme, en 2017… »

Mais pourquoi utiliser l’anglais pour mettre en avant le patriotisme industriel ?

Pour commencer, on pouvait éviter le mot « startup » en utilisant simplement le mot entreprise. Quel intérêt, à ce stade, de préciser qu’elle a été créée récemment, qu’elle recherche des investisseurs, qu’elle est innovante, qu’elle grandit rapidement, etc. . On peut toujours aller se renseigner sur l’entreprise après coup.

Nouvelle ironie, cette entreprise française s’est (comme beaucoup) affublée d’un nom à consonance anglaise (EverEver, qu’on pourrait traduire par exemple par « DéjàDéjà », en sachant que « déjà vu » est utilisé par les anglophones fiers de montrer leur connaissance de la langue française), pour avoir un impact international.

Je travaille régulièrement pour une agence de traduction qui soumet des noms de marque potentiels à des linguistes de diverses nationalités, afin de savoir ce que ces noms évoquent dans leur langue et, éventuellement, de détecter des aspects négatifs. Donc, il aurait été possible à EverEver de se doter d’un nom d’allure francophone qui fonctionne aussi à l’étranger.

Le dirigeant d’EverEver raffole des anglicismes

En parcourant le site, je tombe sur une vidéo de « pitch »; qui se traduit très simplement par « présentation ». Mais « pitch », ça fait plus international, n’est-ce pas ?

Pourtant, une utilisation abusive de l’anglais « pitch » (poix, en français) pourrait bien apporter la poisse (être enduit de poix) aux entreprises françaises.

Le PDG se fait appeler CEO

J’imagine que, quand on étudie à l’ESSEC, on est bombardé d’anglicismes, donc difficile de s’en départir après coup. Les écoles de commerce (qui se font généralement appeler « de management ») constituent l’un des principaux vecteurs d’anglicismes dans notre pays.

Toutefois, depuis 30 ans que je fais ce métier, les traducteurs ont toujours remplacé CEO (chief executive officer) par PDG, c’est-à-dire le dirigeant principal d’une entreprise, responsable de la stratégie et des opérations.

Il semble que, plutôt que de faire traduire leur site en plusieurs langues (désormais facile avec l’IA, mais avec vérification d’un être humain compétent, appelé « traducteur »), certaines entreprises françaises adoptent directement les mots du mondialisme anglo-saxon pour tenter de capter l’attention des pays étrangers.

Donc, d’un côté, on veut mettre en avant la fabrication française, mais d’un autre on utilise la langue qui nous coule

Quand les politiciens, les entreprises, les établissements d’enseignement, les journalistes, les publicitaires et autres métiers pourvoyeurs d’anglicismes, ainsi que le commun des francophones, auront compris que, pour faire survivre leur pays et leur langue, il faut arrêter de tirer contre leur camp, on aura fait de grands progrès.

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